“Circulez, y’a rien à voir !”

En 1953, le film français L’île aux femmes nues fut interdit à Genève car on y voyait des jeunes femmes se promener en bikini.

Aujourd’hui, ce sont des frontaliers français qui se pressent dans les cinémas genevois pour voir le film de Virginie Despentes, Baise-moi, interdit dans leur pays.

Que s’est-il donc passé à Genève entre ces deux dates?

C’est ce que les Archives d’Etat de Genève vous convient à découvrir grâce à un voyage au coeur de la censure cinématographique. Au travers de    documents provenant de la défunte Commission cantonale de contrôle des films, le visiteur pourra se faire une idée de l’incroyable changement qui.  s’est produit dans les moeurs et les mentalités de cette deuxième moitié du XXe siècle: ce qui choquait nos grands-parents, voire nos parents, à une.  époque somme toute pas si lointaine, nous semble à nous, spectateurs d’aujourd’hui revenus de tout, un peu désuet et bien naïf!

La première partie de l’exposition est consacrée à une brève histoire du cinéma à Genève.

Commissaire de l’exposition: Jacques BARRELET

Les premières représentations cinématographiques en Suisse eurent lieu à Genève lors de l’Exposition nationale de 1896, et plus précisément dans le Palais des fées, situé au coeur du parc de plaisance, sorte de Luna-Park où les visiteurs de l’exposition avaient la possibilité de s’amuser un peu.

Affichette publicitaire pour le Palais des fées (BPU)

Le film de Jean Choux, La vocation d’André Carel, date de 1924-1925 et fait partie des premières réalisations cinématographiques à Genève. Certaines scènes furent tournées sur une barque du Léman, au large de Meillerie. Il s’agit du premier film dans lequel joua Michel Simon.

Affiche du film (Cinémathèque suisse)

Photo du tournage sur la barque (Cinémathèque suisse)

Une voiture publicitaire pour un film passant au “Capitole” en 1931 et l’entrée du “Studio 10” après 1934.

Voiture publicitaire (CIG)

Entrée du “Studio 10” (CIG)

Le réalisateur genevois Jean Brocher (1899-1979) réalisa de nombreux films de commande pour la Croix-Bleue, notamment Taxi 22, un drame de l’alcoolisme tourné en 1933, avec Roger Barrelet dans le rôle du petit Pierre. L’affiche est de Noël Fontanet. Photo de Jean Brocher lors du tournage de La bourse ou la vie en 1927-1928.

Affiche de Taxi 22 (Cinémathèque suisse)

Photo de Brocher en tournage (Cinémathèque suisse)

Charles-Emile Sauty (1900-1967) fut non seulement réalisateur de films, mais également opérateur pour Pathé-Journal, journaliste, écrivain et magicien. C’est lui aussi qui a ouvert le magasin de farces et attrapes bien connu à Genève, “La Gaîté”. Une photo de Charles-Emile Sauty comme opérateur pour Pathé-Journal et une photo d’un de ses films, Zora l’endiablée, tourné en 1923.

Photo de Charles-Emile Sauty comme opérateur pour Pathé-Journal

Photo du film Zora l’endiablée (Coll. Sauty)

Le Centre d’animation cinématographique “Voltaire” fut fondé dans les années 70 par Claude Richardet et François Roulet. Sa direction a été reprise en 1977 par Rui Nogueira et Nicoletta Zalaffi. Photo de la salle de projection de l’ancien CAC-Voltaire à la rue Voltaire 27.

Photo de la salle de projection (Coll. Nogueira)

Dans les années cinquante, la Confédération s’inquiète des films français faisant l’apologie de la Légion étrangère. Elle y voit une forme de racolage déguisé. Affiche du film Sidi-Bel-Abbès, en 1955, avec sa publicité dans le journal La Suisse.

Affiche (AG)

Publicité pour le film Sidi-Bel-Abbès (AEG)

En 1953, le film français L’île aux femmes nues fut interdit à Genève. Tourné dans un camp de nudistes, on y voyait des jeunes femmes en bikini, les seins nus. Affiche du film avec l’arrêté du Département de justice et police interdisant sa projection à Genève.

Affiche de L’île aux femmes nues (AEG)

Critique (AEG)

Le Département de justice et police était également responsable du contrôle des affiches. Celle du film Cigarettes, whisky et p’tites pépées, tourné vers 1958, est refusée. Motif: le contour des seins des jeunes femmes est trop marqué.

Affiche originale en couleur du film (AEG)

Les directeurs de cinémas étaient tenus d’envoyer au Département de justice et police les photos publicitaires qu’ils souhaitaient afficher dans leurs établissements. Un fonctionnaire chargé du contrôle de celles-ci apposait alors un tampon “affichage autorisé”, “affichage à l’intérieur” ou “affichage refusé”.

La première photo fut refusée, la seconde autorisée à l’intérieur et la dernière autorisée une première fois à l’intérieur, puis refusée.

Scorpio avec Alain Delon (AEG)

Couple de nudistes (AEG)

Hippies (AEG)