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Un songe de Genève
Suggéré par le poème de Jean de La Fontaine Le songe de Vaux, le titre de cette exposition évoque la ύβρις, la démesure du surintendant Fouquet, qui voulut éblouir le jeune roi Louis XIV par une somptueuse fête au château de Vaux-le-Vicomte et qui le paya de sa liberté et de sa fortune.
N’y a-t-il pas, dans la succession de projets coûteux et audacieux présentés dans cette exposition, certaines réminiscences de ce songe? Certes, la république protestante ne recherchait pas le luxe, dans l’état perpétuellement calamiteux de ses finances, et ne voulait pas éblouir ses voisins, du moins jusqu’à une époque récente. Il n’empêche que dans les spéculations urbanistiques et dans les somptueux projets de bâtiments ou d’«hôtels des Archives», comme d’ailleurs aussi dans ceux de la «Grande Genève» des années 1930, le bateau a plus d’une fois été chargé au point de sombrer en votation populaire, ou au minimum d’être immobilisé sans parvenir au port.
Ce défaut n’est d’ailleurs pas propre à Genève, puisqu’au XVIIIe siècle le projet français d’une ville nouvelle à Versoix, qui devait rivaliser avec Genève, n’a pas résisté à la disgrâce de son auteur, le ministre-duc de Choiseul.
Mais pour en venir à des considérations plus positives, on est frappé, parmi les projets de réaménagement, par l’esprit novateur et l’audace des architectes du XIXe et du début du XXe siècle. La conservation des monuments sous leur forme d’origine leur est relativement indifférente: ils imaginent, démolissent, construisent et reconstruisent, surélèvent, sans égard à la nostalgie, à l’attachement aux vieux souvenirs, à certains symboles, qui marquent leurs contemporains. On voit là toute la distance qui nous en sépare.
Finalement, c’est l’inventivité, la créativité de ces hommes, ajoutée à leur propre individualisme et à celui de leurs concitoyens, à une notion plus que puriste de la démocratie, source de débats et de conflits répétés, qui ont conduit à la dispersion des efforts et à l’incapacité de réaliser les projets.
L’exposition suit un ordre approximativement chronologique, dans la mesure où la configuration des vingt-et-une vitrines des Archives le permet: les projets de fortifications du début du XVIIIe siècle, avec les importants remous politiques qu’ils ont provoqués, les projets des rivaux politiques de Genève à Versoix, et puis ces entreprises si contraires à l’éthique protestante telle qu’on se la figure: un théâtre, un jardin zoologique, mais aussi une prison, un monument de la Réformation – mais qu’en eût dit Calvin, qui ne voulait pas qu’on aille en pèlerinage sur sa tombe? –, le monument Brunswick, des projets urbanistiques qui ont évidemment fleuri à partir de la démolition des fortifications et jusqu’à nos jours, dont le plus impressionnant, pour ne pas dire le plus inquiétant, est sans doute le plan directeur de Maurice Braillard de 1935, mais aussi les projets pour le quartier des Eaux-Vives, les zones de verdure conçues en 1948.
Et puis, à partir des années 1950-1955, cet urbanisme de surchauffe, dont on devrait aussi parler, qui a provoqué autant de débats à Genève que la question des fortifications aux XVIIIe et XIXe siècles: sur leur construction d’abord, puis sur leur démolition.
Peut-on dire que le «clou» de l’exposition est le vaste plan de la liaison ferroviaire Cornavin–Eaux-Vives–Annemasse, qui revient périodiquement sur le tapis depuis 1912, et qui semble enfin devoir trouver une réalisation? Ce projet ambitieux, qui ressortit à «la recherche obstinée, mais avec des résultats souvent décevants, des accès routiers, puis ferroviaires et autoroutiers» (Paul Guichonnet), sera certainement la grande affaire genevoise des prochaines décennies. On veut espérer que, cette fois, la discipline civique l’emportera sur l’individualisme pour réaliser une liaison riche de promesses pour l’ensemble de la région. Mais à certains égards, on peut penser qu’il arrive un peu tard, trop tard en tous cas pour stimuler l’industrie qui se développait avec vigueur dans les deux premiers tiers du XXe siècle.
Pour nous, la source de toutes les frustrations est bien sûr le projet sans cesse renvoyé à des temps meilleurs d’un «hôtel des Archives», qui permettrait de regrouper l’ensemble des dépôts et de gérer enfin les Archives de manière rationnelle, et sans doute plus économique.
L’exposition actuelle met en valeur les acquisitions récentes des Archives de l’Etat, telles que le fonds de l’architecte Edmond Fatio (fonds inépuisable) ou la collection de Gustave Dumur, ou encore les archives de la Société des Eaux d’Arve et celles de l’ancien Département des travaux publics.
Il nous plaît aussi de relever tout le travail d’analyse et de réflexion des archivistes autour de ces ensembles de documents, en particulier de M. Jacques Barrelet et de Mme Véronique Probst, commissaires de l’exposition; de saluer aussi, une fois de plus, l’engagement de tout le personnel des Archives pour la réalisation de cette œuvre commune du service, l’aide et la disponibilité des institutions sœurs et le soutien des autorités aux activités des Archives de l’Etat. Que tous les artisans de cette réalisation en soient ici remerciés.
Catherine Santschi
Archiviste de l’Etat
Photographies, affiche et brochure réalisées par Janine Csillagi.
Les Archives d’Etat remercient pour leur aimable collaboration Mmes Danielle Buyssens, Christine Falcombello, Ariane Girard et Anastazja Winiger, ainsi que MM. Livio Fornara, Alain Jacquesson, Cédric Noir, Jacques Vaucher et Armand Zambrella.
https://archives-etat-ge.ch/page_liste_menu/expositions-songe-de-geneve-projet-de-ville-projet-de-vie/
1. Les fortifications Buisson, 1716
En 1711, vu les progrès de l’artillerie, les fortifications de Genève doivent être modernisées; plusieurs ingénieurs et militaires sont «invités à donner leurs idées» et l’on voit alors «surgir une infinité de plans dans des systèmes différents».
Le plan du brigadier Ami Buisson (1649-1721), un officier genevois au service de France, pourrait bien être une réponse à cette sollicitation, bien que plus tardif (1716).
C’est le collectionneur Gustave Dumur qui, voyant ce plan chez un marchand, se rappelle cet extrait d’une lettre de Jacques-Barthélemy Micheli du Crest:
En 1716, le brigadier Buisson «me communiqua un fort beau plan qu’il avait conçu à Paris pour fortifier notre ville et qu’il venait d’y faire dessiner par Mr Desbergeries Officier dans son régiment, c’était une ovale parfaite […] qui supposait une destruction de toutes les anciennes fortifications, et pourvoirait assez bien […] à l’entrée et à la sortie des eaux, car disait-il la Ville est par là toute ouverte et la communication de Saint-Gervais n’est point assurée.
Je me souviens très bien qu’il faisait passer le Rhône à sa sortie par nombre d’arcades qui formaient une courtine épaisse et terrassée qui assurait la communication de Genève à Saint-Gervais […].
Mais je lui fis l’objection du haut et bas terrain, qui soumettait son plan aux revers du haut et du bas, ce qu’il n’avait pu prévoir à Paris n’ayant pas un plan du terrain ou les hauteurs et pentes fussent dessinées. Mr le Brigadier Buisson me répondit qu’il examinerait la chose sur le terrain même ; ce qu’il fit peu après et à son retour il me dit que la chose était telle que je lui avais dépeinte et que cela méritait des réflexions et un autre arrangement. Or peu après il partit pour Paris, ou il ne vécut pas longtemps.» (Lettre au conseiller Jalabert, 1er avril 1762, Archives d’Etat de Berne).
Projet de fortification de Genève par le brigadier Ami Buisson, 1716 (Collection Dumur, Archives privées 247/V/133)
Parmi les ingénieurs sollicités en 1711 figure le brigadier-général Guillaume Levasseur des Roques (c.1668-1730), le directeur général des ingénieurs des Etats de Hollande (Pays-Bas). Ce dernier propose de se charger lui-même des travaux. Après un séjour à Genève, Des Roques soumet une série de documents à la Chambre des fortifications et au Conseil, et leur recommande l’ingénieur Pierre Pradès de La Ramière. Les deux hommes élaborent le plan de fortification qui sera choisi et exécuté, dès 1716.
A cette époque, Jacques-Barthélemy Micheli du Crest (1690-1766), qui a mené plusieurs campagnes militaires dans les armées du roi de France, est de plus en plus passionné par les fortifications. La discussion du plan Buisson a attiré son attention sur les défenses côté lac et Rhône, ainsi que sur l’importance des données topographiques. Micheli du Crest passe plusieurs années à développer et perfectionner des techniques et des instruments de mesure et de cartographie.
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/1-les-fortifications-buisson-1716/
2. Les fortifications Micheli du Crest, 1730
Entre 1721 et 1726, les travaux menés dans les bastions de Saint-Antoine et du Pin, suivant le plan de fortification de Des Roques et de La Ramière, rencontrent de grandes difficultés. L’année suivante, la commission chargée d’étudier les travaux et leurs coûts accepte sans discussion un rapport présenté par de La Ramière. Bien que siégeant dans cette commission, Micheli du Crest, saisi d’une extinction de voix, ne peut faire valoir ses arguments.
Révolté par ces deux événements, Micheli du Crest s’attelle à la rédaction de son Mémoire pour le Magnifique Conseil des Deux Cents de Genève, du 22 novembre 1728. Dans ce document, il critique le plan de La Ramière, qui constitue un beau plan à la Vauban, mais ne tient aucun compte de la topographie, puisqu’il établit «la même quantité d’ouvrages au devant des parties fortes comme au devant des parties faibles». Puis Micheli propose un projet mieux adapté.
La diffusion de ce mémoire et le refus de subir la censure du Conseil provoquent la condamnation de son auteur, qui est accusé d’allumer «une funeste guerre entre le Magistrat et le peuple». Micheli du Crest est déchu de sa bourgeoisie, sa seigneurie et ses biens sont confisqués. Après quelques années d’errance, il passera vingt ans emprisonné au Château d’Aarbourg (1746-1766).
Projet de La Ramière pour continuer la ligne des contregardes sur les fronts de Plainpalais et Saint-Gervais. Dessin de Micheli du Crest, s.d. [1728-1730] (AEG, P.E. 3) [Non reproduit]
Projet de Micheli du Crest en contradiction avec celui de La Ramière. 3e projet, s.d. [1728-1730] (AEG, P.E. 4)
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/2-les-fortifications-micheli-du-crest-1730/
3. La Ramière – Micheli
MICHELI CRITIQUE LA RAMIÈRE | PLAN MICHELI – 3e PROJET |
A l’ouest et au nord : Saint-Gervais et le lac | |
Les fortifications prévues ne seront pas réalisées avant longtemps, car le devis présenté ne les prend pas en compte. Est-ce parce qu’aucune attaque n’est à craindre de la France ? |
Celui qui prend Saint-Gervais prend aisément le reste de la ville : • un bras du Rhône est dérivé pour protéger la place Saint-Gervais d’une attaque • il faut refaire ou renforcer les bastions qui soutiennent le chemin couvert et protègent la manœuvre des écluses, les ouvrages de Saint-Jean et le passage du Rhône. Pour pouvoir contrer une attaque par le lac : • suppression du bras gauche du Rhône et élargissement du quai en intégrant l’île • suppression de l’île des barques (île Rousseau), pour favoriser le cours du Rhône • construction d’un grand port pour la sécurité des galères et bateaux. |
Au sud : Plainpalais | |
De grandes fortifications sont prévues, alors qu’elles ne sont pas nécessaires. | Les fortifications du 18e s. et l’Arve suffisent à empêcher le déploiement de troupes. Il n’est pas utile de faire des modifications, sans compter que l’on peut inonder Plainpalais. |
A l’est : le front de Champel | |
Sur ce front, l’assaillant bénéficie d’une position dominante, surtout depuis que les nouvelles fortifications du Pin et de Saint-Antoine, faites à grand peine et à grands frais, s’avèrent moins élevées que les anciennes. L’assaillant peut tirer à revers sur Rive et Plainpalais. | Il faut englober le plateau de Champel dans les fortifications, pour bénéficier d’une position dominante, couvrir Rive et contrôler l’Arve. Le nouveau quartier, dont la trame reprend le camp de légion romaine décrit par l’historien Polybe, permet de loger 3 à 4000 habitants et commerçants. Il n’y a pas de nouvelle porte. Le Conseil a été effrayé par la grandeur du faubourg et l’afflux de nouveaux habitants qui créeraient un nouvel équilibre social. |
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/3-la-ramiere-micheli/
4. Vieux-Collège et Versoix
Le cul-de-sac de la rue du Vieux-Collège
Avant de s’étendre de la place de la Madeleine à la rue d’Italie, la rue du Vieux-Collège n’était qu’une impasse partant de la rue Verdaine et aboutissant à un talus. En 1777, les autorités genevoises confient au maître maçon Pierre-David Matthey la tâche de «relier cette impasse à la rue des Casemates, ceci dans le but de faciliter les communications entre le haut et le bas de la ville» (AEG, R.C. 278, p. 211 [Communication de l’Inventaire des monuments d’art et d’histoire du canton de Genève]).
1. Plan de Genève et photo actuels montrant où se situait l’impasse de la rue du Vieux-Collège avec l’escalier qui a été réalisé à l’époque. [Non reproduit]
2. Projet non réalisé avec un pont passant au-dessus de la rue du Vieux-Collège (AEG, Travaux B 4.18). [Non reproduit]
3. Projet réalisé avec un escalier menant à la rue du Vieux-Collège (AEG, Travaux B 4.17). [Non reproduit]
La Ville de Versoix
C’est sous l’impulsion du duc de Choiseul, secrétaire d’Etat aux Affaires de la guerre, que prend forme le projet de construire une ville à Versoix, alors seul port du Pays de Gex sur le Léman. Le but est commercial: offrir une ville de commerce susceptible de servir d’alternative à Genève pour les marchands français, mais aussi : assurer au roi le contrôle de la seule route reliant Genève à ses alliés suisses.
Un premier plan de la ville est dressé par l’ingénieur Pierre Joseph Bourcet et les travaux débutent en 1768. En 1770, la disgrâce du duc est prononcée et les travaux s’arrêtent. En 1774, Nicolas Céard, mandaté par l’inspecteur général des Ponts et Chaussées Jean Querret, dessine un autre projet deux fois moins étendu que le précédent (le plan est néanmoins signé par Jean Querret). La ville ne devrait cette fois-ci abriter que 10 ou 12 mille habitants.
La construction de la ville est réactivée de 1776 à 1777. On commence notamment à tracer l’enceinte et l’alignement des rues suivant le plan de Céard. Faute d’argent et de soutien politique, le projet finira par s’enliser. Outre le port, la réalisation la plus importante du projet sera celle du canal destiné à conduire les eaux de la Versoix au sommet de la ville.
4. Copie du plan de Nicolas Céard avec les parcelles acquises à l’époque par le roi de France (AEG, P.P. 143)
5. On peut noter que le tracé de l’enceinte et des rues selon le plan de Bourcet a laissé une empreinte encore bien visible dans la topographie d’aujourd’hui. [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/4-vieux-college-et-versoix/
5. Le théâtre des Bastions
Genève fut secouée tout au long du 18e siècle par de nombreux conflits qui opposèrent une bourgeoisie en quête de nouveaux droits politiques et économiques à une aristocratie dirigeante, jalouse de ses privilèges. A plusieurs occasions, le gouvernement dut faire appel à des puissances étrangères afin de ramener l’ordre dans la cité et servir de médiateurs entre les parties. C’est ainsi que des garnisons étrangères, notamment françaises, s’établirent momentanément dans la ville.
Confinés dans l’austère cité de Calvin, où le théâtre était interdit, les officiers français, loin des fastes de Paris, semblaient manquer cruellement de distractions. C’est à leur demande, lors de la médiation de 1766, qu’un premier théâtre en bois fut bâti. Celui-ci brûla deux ans plus tard et il fallut attendre la médiation de 1782 pour qu’un nouveau théâtre, toujours à la demande d’officiers français, voie le jour. Construit en pierre cette fois-ci, l’édifice était situé dans le Parc des Bastions, à l’angle de la Place Neuve et de la rue de la Croix-Rouge. Il ne fut détruit qu’en 1880.
1. Projet pour le théâtre de 1782: coupe du bâtiment. On remarquera, à droite, entre les deux colonnes, des loges donnant directement sur l’avant-scène. Cet espace, très prisé, puisque bien en vue, et donc rentable, était généralement réservé à des spectateurs de marque. A l’époque de la construction du théâtre des Bastions, ce type de loges était contesté, principalement pour des raisons acoustiques et visuelles (AEG, Travaux B 2/171) [informations d’Ariane Girard]. [Non reproduit]
2. Projet pour le théâtre de 1782: plan des premières loges. L’architecte semble avoir privilégié une rentabilisation maximale de l’espace. On peut noter dans les angles arrière de la salle, deux loges d’acteurs, jouxtant des latrines et un réduit à chaises, et qui débouchent directement sur le corridor. Cette situation aurait donc obligé les acteurs à parcourir le corridor réservé au public pour se rendre sur la scène (AEG, Travaux B 2/172) [informations d’Ariane Girard]). [Non reproduit]
3. Coupe et plans du théâtre tel qu’il fut finalement construit. Ces plans ne sont pas signés, mais peuvent être attribués à l’architecte Pierre David Matthey (AEG, Archives privées 17). [Non reproduit]
4. Photo du théâtre (AEG, Archives privées 17). [Non reproduit]
5. Gravure de Christian Gottlob Geissler représentant la Porte Neuve et le théâtre des Bastions en 1810, photo (BPU). [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/5-le-theatre-des-bastions/
6. Ancienne prison de l’Evêché
L’ancienne résidence des princes-évêques, convertie en prison à la Réforme, réussira tant bien que mal à remplir son rôle jusqu’à l’entrée de Genève dans la Confédération en 1816. A cette date, Genève, qui s’est enrichie de nouveaux territoires français et savoyards, voit sa population augmenter d’un tiers. A cela s’ajoute une pénalité moins cruelle, qui substitue des peines de détention aux anciens châtiments corporels.
Ces deux facteurs vont entraîner une augmentation des détenus qui poussera les autorités à lancer en 1820 deux concours, l’un pour l’amélioration et l’agrandissement de l’ancienne prison, l’autre pour la construction d’un bâtiment entièrement neuf. C’est finalement la deuxième solution qui fut retenue.
Construite entre 1822 et 1825, cette prison pénitentiaire était considérée à l’époque comme avant-gardiste. Ses particularités principales consistaient en une séparation des détenus selon l’âge et la gravité du délit, ainsi que dans la possibilité de surveiller l’ensemble de la prison depuis un poste d’observation central. L’édifice se situait approximativement sur l’actuelle place de Rive.
Dix ans à peine s’étaient écoulés qu’il fallut se rendre à l’évidence que la prison pénitentiaire était déjà trop petite. Il fut alors décidé de détruire l’ancienne prison de l’Evêché et d’en bâtir une nouvelle au même emplacement. La construction du nouvel établissement pénitentiaire se termina en 1842. C’est dans un de ses cachots que Luigi Lucheni, l’assassin de l’impératrice Sissi, fut retrouvé pendu.
1. Détail du plan Billon situant l’ancienne prison de l’Evêché, approximativement à l’emplacement de l’actuelle Terrasse Agrippa-d’Aubigné. L’arrière de la cathédrale et l’escalier des Degrés-de-Poules sont à droite sur le plan (Plan Billon). [Non reproduit]
2. Plan du projet d’amélioration et d’agrandissement de l’ancienne prison de l’Evêché de 1820. L’escalier des Degrés-de-Poules est en haut à droite du plan (AEG, Travaux B 2/11.1)
3. Photo de la prison pénitentiaire de Rive, construite entre 1822 et 1825 (CIG). [Non reproduit]
4. Photo de la nouvelle prison de l’Evêché, construite entre 1840 et 1842 (CIG). [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/6-ancienne-prison-de-leveche/
7. Le débarcadère de Rive, 1845
Le 19e siècle est marqué par l’essor du chemin de fer; les questions relatives à la construction d’une gare et au choix de son implantation mobilisent les milieux politiques et militaires, mais aussi bancaires et commerciaux. En 1845, le Conseil d’Etat et le Conseil administratif nomment chacun une commission spécialement chargée d’examiner ces questions; l’ingénieur cantonal Dufour – qui n’a encore jamais vu de chemin de fer – va étudier sur place ceux d’Alsace et du Grand Duché de Bade. Pendant ce temps, divers investisseurs montent des projets favorisant tantôt le raccordement avec la France, par les lignes Lyon-Genève ou Mâcon-Genève, tantôt avec la Suisse, par la ligne Lac de Constance-Lac de Genève.
L’emplacement de Rive a la préférence du Conseil administratif et d’associations de «commerçants, industriels et propriétaires de la commune de Genève». En effet, il répond à plusieurs exigences: il offre un large espace horizontal – ce qui est difficile à trouver à Genève – qui permet l’installation de la gare et des nombreux bâtiments annexes; il est protégé par les fortifications; il est à proximité immédiate du port – le trafic des bateaux et remorqueurs à vapeur est très important – et enfin il est situé dans un quartier de grande activité commerciale.
Le Conseil d’Etat estime que choisir cet emplacement «c’est servir les intérêts existants aujourd’hui, mais c’est préparer leur ruine prochaine […] c’est faire arriver le chemin de fer dans une impasse, c’est renoncer à le prolonger sur la Suisse à moins de difficultés et de dépenses considérables» (AEG, R.C. cop. 376, p. 638). Le risque majeur est que Genève soit écartée de la grande communication France-Suisse et ne se trouve plus reliée que par des embranchements secondaires.
Le choix définitif de l’implantation de la gare à Cornavin date de 1854.
Cette vue perspective de Jean Dubois, incroyablement élargie, illustre un projet de gare à Rive, présenté par l’entreprenant architecte Jean-Marc-Louis Junod (1803-1873).
1. Perspective représentant le quartier à construire dans le prolongement du quai et le débarcadère de Rive suivant le projet de M. Junod. Vue et légende par J. DuBois et Schmid lith., Genève, 1845-1846 (Collection Dumur, )
2. Débarcadère pour Rive, 3e étude Junod, 1845 (AEG, Travaux BB 13.3) [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/7-le-debarcadere-de-rive-1845/
8. Un jardin zoologique aux Bastions, 1870
En haut à gauche, un petit plan permet de bien préciser l’implantation du zoo, entre la promenade des Bastions et les rues de Candolle et Saint-Léger, c’est-à-dire sur une portion du parc qui, mise à part l’allée d’arbres, est encore à l’état de terrain vague.
Si le comité initiateur de ce jardin zoologique, en mars 1870, met en avant le plaisir et l’instruction des visiteurs genevois et étrangers, il apparaît clairement qu’installer un zoo aux Bastions, c’est le mettre en relation directe avec le Jardin botanique (1818), l’Orangerie (1818, démolie en 1910) et le Conservatoire de botanique, situé derrière le Théâtre (1824, détruit en 1934). Et plus particulièrement encore à proximité du Musée des sciences naturelles et de l’Académie – la future Université – dont les bâtiments sont encore en construction (de 1868 à 1872).
Ce projet vise alors à établir à Genève un véritable pôle de recherche scientifique, comme le dévoile l’identité de ses initiateurs, parmi lesquels se trouvent François-Jules Pictet de la Rive (1809-1872), qui est alors professeur de paléontologie, de zoologie et d’anatomie comparée; Victor Fatio (1838-1906), éminent zoologue et spécialiste des vertébrés; Philippe Camperio (1810-1882), ancien professeur de droit, homme d’Etat et ardent promoteur de l’Université.
Le plan établi par Francis Gindroz, l’un des architectes de l’Académie, présente un réel jardin d’agrément, avec un café, de larges allées et de beaux arbres – dont on peut même reconnaître les essences – et plusieurs points d’eau. Mis à part les singes et les gazelles, les espèces sont «principalement des animaux des Alpes». Il n’est pas encore question ici de jardin d’acclimatation ou de velléités éthologiques: si les bouquetins et les chamois se partagent bien une «montagne» de rochers, les gazelles, quant à elles, profitent de saules et de sapins!
En novembre 1870 déjà, le projet est abandonné, vu la «froideur» du public genevois, le succès mitigé remporté par la souscription, et les «graves événements politiques» qui monopolisent toutes les attentions – Genève est submergée par les grèves et les conflits politiques et religieux, tandis que la guerre franco-prussienne fait rage.
1. Genève Jardin zoologique. Plan général 1870. Lithographie polychrome par F. Noverraz, Genève, 1870 (Collection Dumur, AEG, Archives privées 247/V/93)
2. La rue Saint-Léger et les Bastions vers 1861 (CIG, photographie). [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/8-un-jardin-zoologique-aux-bastions-1870/
9. L’extension du Jardin anglais, 1870
La création du Jardin anglais est liée au développement d’un nouveau quartier de luxe, et plus encore à la construction de l’Hôtel de la Métropole par l’architecte Joseph Collart, entre 1852 et 1854. Du reste, cet hôtel s’adjuge le Jardin anglais de la même façon que l’Hôtel des Bergues (construit en 1830-1834) a fait de l’île Rousseau son jardin privé.
D’abord appelé «promenade du Lac», ce jardin public est obtenu par le comblement du Port au Bois et est entièrement conquis sur le lac, selon le principe qu’on ne démolit pas les ouvrages d’art en eau, mais qu’on peut combler les vides.
Profitant de la construction du pont du Mont-Blanc, en 1862, le Jardin anglais est remodelé et agrandi une première fois: sa forme devient rectangulaire et plus calme.
En 1870-1871, le Jardin est à nouveau étendu, à l’occasion du prolongement du quai des Eaux-Vives, et c’est de cette période que date ce projet. Il constitue, avec sa vue panoramique extrêmement étendue, un véritable manifeste touristique en faveur de la rive gauche. Nous voyons un vrai lieu de promenades, avec de larges allées, des plates-bandes ordonnées, un emplacement réservé pour un monument «à la Brunswick», un casino, des oiseaux aquatiques, un jardin zoologique et même le fameux baromètre chargé de rassurer les touristes dépités…
Enfin, l’emprise sur le lac est si importante que les Pierres du Niton sont reléguées au rang de décor d’un bassin artificiel!
3. Projet d’agrandissement du Jardin anglais, vers 1870 (BPU-CIG, 40 M-02-01; photographie, restauration numérique)
4. Le Jardin anglais et l’Hôtel de la Métropole, carte postale. [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/9-lextension-du-jardin-anglais-1870/
10. Le monument de la Réformation d’Edmond Fatio, 1908
Il faut attendre 1864 et l’édification du «Calvinium» – la Salle de la Réformation – pour que soit réalisé le premier monument à la mémoire de Jean Calvin, «lui qui ne voulut pas même que l’on plaçât une pierre sur sa tombe».
En 1904, un comité provisoire et confidentiel se crée, composé d’Auguste Chantre, professeur de théologie, de Charles Borgeaud, professeur d’histoire et de droit et du sculpteur Maurice Reymond. Ce comité souhaite l’édification d’un monument «à Calvin, à la Réforme et à Servet» à l’occasion des 400 ans de la naissance de Jean Calvin. Il décide d’emblée de placer le programme sur le plan historique, pour éviter les «fondrières» confessionnelles ou dogmatiques, et travaille déjà sur un monument de type adossé.
En 1906, l’Association du Monument de la Réformation (AMR) se présente au public et commence aussitôt le recrutement de membres et la collecte de fonds, à un niveau international. L’année suivante, après de nombreuses tergiversations, l’emplacement de l’ancien jardin botanique est arrêté et l’organisation d’un concours international décidée.
En 1908, le projet lauréat est «Le Mur» par A. Laverrière et J. Taillens, pour ses qualités architecturales.
En 1909, un second concours, ouvert aux meilleurs sculpteurs du premier, choisit les artistes chargés de réaliser les figures du monument: H. Bouchard et P. Landowski. Ils travailleront sous l’étroite direction de Charles Borgeaud.
Le 7 juillet 1917, le Mur des Réformateurs est remis à la Ville de Genève.
1. Le projet «Post Tenebras Lux» de l’architecte Edmond Fatio est présenté au concours de 1908, où il remporte l’un des sept 3e prix ex-aequo. Cette aquarelle montre l’arrivée du Mayflower, le vaisseau qui amène les pèlerins anglais en Nouvelle-Angleterre, en 1620. Si l’idée du jardin historique est appréciée, l’architecte et historien de l’art Camille Martin regrette que «par l’éparpillement de toutes ces oeuvres dans une grande partie de la promenade des Bastions, le projet architectural proprement dit manque du caractère d’unité qui se retrouve dans d’autres projets» (photographie, détail, BPU-CIG, Rec Est 444/2)
2. Le Mur tel qu’il a été construit, carte postale. [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/10-le-monument-de-la-reformation-dedmond-fatio-1908/
11. Le mausolée Brunswick de Vela, 1874
Lorsque le duc de Brunswick meurt à l’hôtel Beau-Rivage, en 1873, la Ville de Genève hérite de son immense fortune personnelle pour autant qu’elle respecte les dernières volontés du défunt: «Nous voulons que notre corps soit déposé dans un mausolée au-dessus de la terre, […] dans une position proéminente et digne. Le monument sera surmonté par notre statue équestre et entouré par celles de notre père, grand-père, etc., de glorieuse mémoire d’après le dessin attaché à ce testament en imitation de celui des Scaligeri enterrés à Vérone».
Les exécuteurs testamentaires portent leur choix sur la toute nouvelle place des Alpes et mandatent le sculpteur renommé Vincenzo Vela (1820-1891). Ils se montrent malheureusement incapables de décider d’un parti esthétique, alors même que Vela travaille déjà sur la maquette et les sculptures principales dans son atelier tessinois. S’engage alors une querelle d’experts qui oppose d’un côté Eugène Viollet-le-Duc, partisan – comme Vela – d’une interprétation assez libre du modèle italien, et de l’autre l’architecte Jean Franel et les experts français Joseph-Louis Duc et Hector Lefuel, partisans de la copie fidèle du mausolée véronais.
Vincenzo Vela ne peut accepter la tutelle de Franel que veulent soudain lui imposer les exécuteurs, alors qu’il a justement été mandaté pour ses qualités de créateur. La maquette de Vela mais aussi les projets et sculptures déjà réalisés sont rejetés au profit de ceux de Franel.
Sur les 24 millions légués à Genève, deux sont utilisés pour le mausolée. Ce legs permet la construction du Grand Théâtre, de l’Ecole d’horlogerie, de l’Ecole du Grütli, de l’Université, de l’Abattoir…
3. Maquette du monument par Vela. L’artiste préfère la place Dorcière, plus petite, sombre et austère – et donc plus proche du modèle véronais – mais aussi au sol plus résistant. Photographie tirée du Vela de Romeo Manzoni (1906).
4. Le Mausolée avant 1890, année où la statue équestre, trop lourde, est déposée, cartes postales. [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/11-le-mausolee-brunswick-de-vela-1874/
12. Le Palais de Justice à l’Ancien Arsenal, 1829
Si, depuis l’importante restauration de 1972, l’Ancien Arsenal est le siège des Archives d’Etat, son aspect général date de 1634, année où ce grenier à blé est reconstruit en pierre. Entre le grenier et les Archives, le bâtiment a connu d’autres affectations: arsenal pour la Seigneurie entre 1720 et 1877, Musée des armures, poste de gendarmerie, bureau de la Sûreté…
En 1825, dix ans après la séparation des pouvoirs administratifs et judiciaires, l’hôtel de ville peine à satisfaire ses nombreux occupants. On envisage l’aménagement de salles dans les combles et la surélévation du bâtiment.
En 1826, la commission chargée de résoudre ce problème de locaux propose la transformation de l’Ancien Arsenal, situé juste en face. Le projet stipule qu’il s’agit de procurer, en surélevant l’Arsenal d’un seul étage, tous les locaux nécessaires au Tribunal civil, à ceux de l’Audience correctionnelle et du Commerce, au Juge d’instruction et au Ministère public. Il implique aussi le remplacement du marché couvert et du dépôt d’armes.
La même année, un concours est organisé pour les plans de la ligne de maisons et du marché couvert à la Corraterie, mais il ne donne pas satisfaction. Le programme du bâtiment du marché est en effet devenu beaucoup trop complexe: il doit accueillir, en plus du dépôt des armes, cinq autres services et bureaux. Ce n’est qu’en 1833, une fois le programme allégé, que l’architecte Vaucher remporte le concours du marché couvert. Entre-temps, le projet de modification de l’Ancien Arsenal en Palais de Justice a été abandonné…
Dans ce projet de transformation de l’Ancien Arsenal en Palais de Justice, le bâtiment ne conserve plus que ses grandes arcades, tandis qu’une bonne partie du promenoir est occupée par l’escalier. Le bâtiment est rehaussé d’un étage et la charpente est entièrement modifiée pour permettre l’installation d’une verrière zénithale éclairant l’escalier. Les salles principales sont réservées aux audiences, les portes des couloirs donnent, au 1er étage sur le bureau et la chambre des témoins du Juge d’instruction, au 2e étage sur le bureau de Conciliation et deux bureaux du Parquet.
1. Profil pour la réparation intérieure de l’Arsenal par Lequin, planche aquarellée, 1828 (AEG, Travaux BB 17/123)
2. L’Ancien Arsenal, photographie. [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/12-le-palais-de-justice-a-lancien-arsenal-1829/
13. L’Hôtel des Archives dans les prisons de l’Evêché, 1918
Lorsqu’en septembre 1914 les derniers détenus de la prison de l’Evêché sont transférés dans les pénitenciers bernois de Thorberg, puis de Witzwil, l’avenir du bâtiment genevois est remis en question. Que faire en effet de ce puissant et solide édifice, construit entre 1840 et 1842 par l’architecte Schaeck?
En 1915, les Archives d’Etat connaissent un criant besoin de locaux pour assurer la conservation des archives du 19e siècle. Le conseiller d’Etat James Fazy préconise la construction d’un immeuble isolé, en ville, «bâtiment en quelque sorte blindé qui échappe à l’incendie»… Quelques «habitués des Archives» reconnaissent dans cette description d’un «bâtiment coffre-fort» la prison récemment évacuée et demandent au Conseil d’Etat d’étudier la transformation de l’édifice.
L’année suivante, sous l’impulsion de Waldemar Deonna, le projet s’étoffe en Musée de la Vieille Genève. Il s’agit de regrouper à l’Evêché les Archives d’Etat et plusieurs collections genevoises dont la consultation et l’étude seraient ainsi facilitées: celles du Vieux-Genève, le musée épigraphique de la Bibliothèque publique, les objets et fragments architecturaux des dépôts du Musée d’art et d’histoire et le Musée de la cathédrale. Plusieurs architectes, parmi lesquels Léon Bovy et Antoine Leclerc, proposent des solutions d’aménagement.
Mais, née en 1915 déjà, une autre idée fait son chemin, celle de l’artiste peintre Albert Trachsel, qui est relayée et défendue par l’architecte Henry Baudin. Selon eux, il est nécessaire de détruire l’Evêché, ce «prototype de laideur et de mauvais goût». A sa place, les deux hommes proposent de créer une terrasse ombragée d’arbres et offrant une vue dégagée à la fois sur la ville et sur le chevet de Saint-Pierre, pour autant que l’on démolisse les maisons de la rue Toutes-Ames (ce qui sera fait en 1938).
La prison de l’Evêché est démolie en 1940, la terrasse Agrippa d’Aubigné construite par le Service d’urbanisme et l’architecte Adolphe Guyonnet entre 1940 et 1941.
1 et 2. Projet de transformation par l’architecte cantonal F. Martin en 1918: les étages sont réservés aux Archives d’Etat, le rez-de-chaussée au Musée du Vieux-Genève (AEG, Travaux BB 17/10)
3 et 4. L’Evêché et les projets de l’architecte Leclerc (Heimatschutz no 3, déc. 1940, et La Question de l’Evêché, 1917). [Non reproduit]
Mis à part le projet du début des années 1980, jamais les Archives d’Etat ne sont passées aussi près de l’établissement d’un Hôtel des Archives qu’en 1918. Il est du reste assez étonnant de constater que les cinq principaux arguments en faveur de la transformation de l’Evêché en siège des Archives d’Etat, en 1918, sont toujours d’actualité, même si les standards ont changé.
En effet, aujourd’hui comme hier, ce service cherche toujours son hôtel des Archives, soit un bâtiment assurant à tous ses précieux documents: a) une protection contre le feu et l’humidité, b) une protection contre les dégâts des nombreux déménagements, c) une surveillance aisée des dépôts et des lecteurs, d) un espace de travail suffisant pour le traitement méthodique des fonds et enfin e) une importante possibilité de stockage pour les nombreux versements attendus.
5. Projet pour un hôtel des Archives de l’Etat, publication du DIA, Genève 1981. [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/13-lhotel-des-archives-dans-les-prisons-de-leveche-1918/
14. Morcellement de Contamines, 1836
En avril 1836, la direction de l’Hôpital reçoit une offre d’achat de la parcelle des Contamines. Ne pouvant s’opposer à la transaction, certains conseillers d’Etat regrettent la vente d’un terrain si proche de la zone de servitude militaire, d’autres craignent l’établissement d’un nouveau faubourg, d’autres encore redoutent que des constructions modernes présentent «les inconvénients et la confusion qu’offre le quartier de Fort-Barreau». Tous se rallient finalement à l’avis d’exprimer le vœu que les constructions soient faites «de manière à ne pas présenter un aspect désagréable à l’œil dans une localité aussi voisine de la ville et d’une promenade publique».
Les acquéreurs, l’architecte Vaucher-Crémieux et le docteur Senn, prévoient le morcellement et la vente de lots pour la construction de maisons de campagne. Ils se conforment au vœu du Conseil d’Etat, qui assure aux futurs propriétaires «toute sécurité sur leurs alentours», et établissent deux documents:
- le plan de morcellement en 24 parcelles, sur lequel figurent les alignements, l’emplacement des maisons et le tracé des chemins et avenues, et
- un cahier des charges donnant au propriétaire des précisions sur l’alignement, le gabarit et l’esthétique souhaités. L’article 4 spécifie même qu’«il ne pourra être établi dans les susdites propriétés, ni des ateliers, abattoirs, maisons de santé d’aliénés, auberges, café, cercles ou sociétés ».
Quatorze maisons seront construites entre 1838 et 1847, le plus souvent sur des alignements différents. Existent encore la maison Joly (5 rue de Contamines, construite en 1838) et celle du général Dufour (9A rue de Contamines, construite en 1845).
Dès 1853, le docteur Senn promeut la construction du «Square des Contamines», un ensemble de petits immeubles contigus, qui restera lui aussi inachevé.
1. Plan des Contamines, projet non exécuté, s.d. (AEG, P.P. 275)
2. La maison du général Dufour (photographie C.N.) [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/14-morcellement-de-contamines-1836/
15. Morcellement à Châtelaine, 1905-1915
Suite à l’installation de l’usine hydro-électrique de Chèvres (1893) et de la nouvelle usine à gaz (1914), Vernier connaît un extraordinaire essor industriel, mais ce développement s’accompagne d’un cruel manque de logements ouvriers bon marché.
Parmi les premières entreprises à s’implanter à Vernier se trouvent les Ateliers H. Cuénod S.A. (1902), une fabrique de régulateurs de machines automatiques. Leur fondateur, l’ingénieur Hermann Cuénod (1857-1933), a déjà créé avec René Thury (1881) l’entreprise qui deviendra la Compagnie de l’industrie électrique puis les Ateliers de Sécheron. Cuénod est également l’initiateur de la création d’habitations ouvrières; il s’investit dans un Comité d’initiative (1893), puis dans la création de la société coopérative Le Foyer, avant de siéger à la direction de la Société coopérative d’habitation (1919), avec l’architecte et urbaniste Camille Martin.
Dans ce plan de morcellement d’Edmond Fatio (1871-1959), la construction de petites maisons jumelées est mise en relation avec l’usine Cuénod, qui n’est pas nommée. Ce projet reprend en quelque sorte la cité ouvrière du Havre (1871), créée grâce à l’impulsion du maire Jules Siegfried. Il propose 44 logements sociaux individuels et locatifs, bénéficiant chacun d’un jardin et d’un aménagement paysager. Fatio travaille 25 ans sur ce projet de cité-jardin, mais seules quelques maisons seront construites, sur le côté pair du chemin de Maisonneuve.
La cité-jardin d’Aïre sera réalisée en 1920-1923 par l’architecte A. Hoechel, pour la Société coopérative d’habitation. Celle de Vieusseux en 1931, par F. Mezger.
3. Projet de morcellement pour maisons ouvrières, 19 janvier 1906, Edmond Fatio architecte (AEG, Archives privées 194/A/78 III). [Non reproduit]
4. Projet de maisons ouvrières, groupe de 4 maisons (AEG, Archives privées 194/A/78 I)
5. Les maisons du chemin de Maisonneuve (photographie C.N.) [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/15-morcellement-a-chatelaine-1905-1915/
16. La gare de Beaulieu, 1913
Avant même sa construction, en 1856-1858, l’emplacement de la gare de voyageurs de Cornavin est contesté. Edifiée pour la Compagnie Lyon-Genève – la future Compagnie Paris-Lyon-Méditerranée – par les architectes Grillot et Gindroz (1828-1878), cette gare traversière rend difficile le raccordement avec la rive gauche, mais surtout elle isole et péjore les quartiers situés au-delà des voies, par l’érection d’un important remblai digne d’un «mur de Chine».
En 1913, le rachat de la gare et des installations du PLM par les Chemins de fer fédéraux promet une grande réorganisation du réseau ferroviaire. Le professeur Louis Favre préconise la démolition du «grand barrage» et l’établissement de la gare de voyageurs en impasse à Beaulieu – dont les terrains sont encore libres. Il propose aussi le déplacement de la gare de marchandises au Grand-Pré et le creusement de voies en tunnels en direction de Châtelaine et de Varembé. Ce projet, qui est soutenu par l’Association des intérêts des quartiers de Saint-Jean et des Charmilles, remporte un franc succès auprès du Conseil d’Etat et du Conseil administratif.
Pendant la guerre, le projet s’enlise. A la fin de l’année 1919, les CFF transmettent six plans de reconstruction de la gare. Les membres de la Commission spéciale nommée par le Conseil d’Etat rejettent unanimement l’idée d’une gare à Beaulieu: le site est jugé trop éloigné de la ville et le coût trop élevé. Quelques-uns préfèrent l’implantation de Cornavin, d’autres le site de Plainpalais.
En 1923, l’emplacement de la nouvelle gare de voyageurs est décidé: c’est Cornavin. Deux concours sont nécessaires pour définir les lignes générales de l’édifice et choisir le projet remanié de l’architecte Julien Flegenheimer (1880-1938).
1. Perspective cavalière de la gare de Beaulieu par Ed. Fatio, 1913 (AEG, Archives privées 194/B/49). [Non reproduit]
2. Détail du plan de situation de la nouvelle gare (voies et bâtiments), s.d. [c. 1913] (AEG, Chemins de fer D 11.19)
3. La gare des voyageurs de Grillot et celle de Flegenheimer, cartes postales (AGMT). [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/16-la-gare-de-beaulieu-1913/
17. Bâtiment des Forces motrices
En 1880, la machine hydraulique de Cordier (bâtiment du pont de la Machine), malgré ses agrandissements successifs, ne suffisait plus à faire face à la demande en eau. La concession des forces motrices sur le Rhône fut accordée à la municipalité de Genève le 30 décembre 1882. Celle-ci s’engagea à construire une nouvelle usine hydraulique qui alimenterait la ville en eau potable et en énergie, produite par la technique de l’eau sous pression. Par la même occasion, elle prenait en charge les travaux nécessaires à la régularisation du lac, notamment par la construction d’un barrage à rideaux. Cette vaste entreprise donna lieu à plusieurs projets.
1. Un des projets d’usine hydraulique présenté par l’ingénieur Théodore Turrettini en 1883.
La commune de Plainpalais, très restreinte dans son budget, avait obtenu récemment du Grand Conseil l’autorisation de créer un nouvel impôt, sous la forme d’une taxe sur l’industrie. Comme le projet en question prévoyait la construction de l’usine sur le territoire de cette commune, la taxe aurait encore chargé les frais généraux. Le Conseil administratif de la municipalité de Genève entama donc des négociations avec le Conseil d’Etat afin qu’une partie du quartier de la Jonction, situé sur la commune de Plainpalais, soit annexée à la Ville de Genève. Devant un refus catégorique, il fut décidé que le bâtiment serait finalement construit sur le Rhône, dont le lit avait été concédé à la municipalité de Genève en 1882 (Th. Turrettini, Utilisation des forces motrices, Genève, 1890)
2. Projet tel qu’il fut finalement réalisé. [Non reproduit]
3. Photo du bâtiment des Forces motrices (Th. Turrettini, Utilisation des forces motrices, Genève, 1890). [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/17-batiment-des-forces-motrices/
18. La Société des eaux de l’Arve
La Société privée des Eaux de l’Arve fut fondée en 1886. Son réseau de distribution d’eau couvrait une partie des quartiers de Champel et des Eaux-Vives, ainsi que plusieurs communes entre Arve et lac. Contrairement à ce que son nom laisserait présager, la Société des eaux de l’Arve ne faisait qu’utiliser l’énergie de cette rivière. L’eau pompée et distribuée provenait en fait d’une nappe d’eau souterraine que l’on atteignait par de grands puits creusés aux abords de l’usine. Dès 1970, la Société des eaux de l’Arve entra en concurrence avec les Services industriels de Genève. Après d’âpres négociations, elle fut revendue à l’Etat en 1988, avec l’ensemble de ses installations.
4. Plan de situation pour un projet d’usine hydro-électrique daté de 1957 (AEG, Archives privées 49.40.1). [Non reproduit]
La population desservie par la Société des eaux de l’Arve ne cessant d’augmenter, on projeta la construction d’une seconde usine capable de fournir l’énergie supplémentaire nécessaire au pompage de l’eau. Un barrage, situé à une centaine de mètres en amont de l’usine existante, détourne une partie de la rivière dans une galerie d’amenée de 6,30 mètres de diamètre et d’une longueur de 680 mètres. Elle passe sous le plateau de Vessy et aboutit dans la falaise oblique qui, sur la rive gauche de l’Arve, suit immédiatement le pont de Vessy. A la sortie de la galerie, l’eau s’étale dans une chambre d’équilibre, qui joue en même temps le rôle de chambre de mise en charge pour deux groupes hydro-électriques, constituant l’équipement générateur de l’usine. Ce projet ne fut jamais réalisé.
5. Dessin représentant le barrage du projet de l’usine hydro-électrique (AEG, Archives privées 49.40.1)
6. Photo retouchée montrant le barrage du projet de l’usine hydro-électrique dans son cadre véritable (AEG, Archives privées 49.40.1). [Non reproduit]
7. Plan en coupe de la galerie d’amenée d’eau aboutissant au niveau du pont de Vessy (AEG, Archives privées 49.40.1). [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/18-la-societe-des-eaux-de-larve/
19. Voies de communication
Après les ténèbres, la lumière
Dès 1850, les fortifications de Genève, devenues inutiles et considérées comme un frein à l’expansion de la ville, sont détruites (la population de l’agglomération genevoise passera de 38’000 habitants en 1850 à 131’000 habitants en 1914). Face à une croissance rapide et désordonnée de la banlieue, l’Etat prend conscience de la nécessité d’élaborer un plan d’ensemble afin de contrôler le développement urbain de Genève.
En 1896, le Conseil d’Etat lance un concours pour le plan d’extension des voies de communication de la ville de Genève et des communes suburbaines.
Le projet exposé ici est l’œuvre des architectes de Morsier, Golay et Barde. La ville est divisée en quatre secteurs: la vieille ville, les nouveaux quartiers, sur l’emplacement des fortifications, les communes suburbaines (Eaux-Vives, Plainpalais, Petit-Saconnex) et les terrains de campagne ou de villas. Il s’agit de tisser un réseau d’artères principales et secondaires unissant ces différents secteurs. Un boulevard périphérique entourant la future ville est parcouru par un tram qui relie toutes les voies radiales. La liaison ferroviaire les Eaux-Vives-Cornavin figure déjà sur le plan. La gare de Cornavin est déplacée et l’on imagine à sa place un parc à la française, formant une estrade pour, selon les propres termes des concepteurs du projet «contempler le spectacle grandiose des Alpes». Il est intéressant de noter que ce projet tient compte des questions d’hygiène, très présentes à l’époque: les rues sont élargies et orientées de façon à ce que chaque immeuble reçoive les rayons du soleil car, toujours selon les concepteurs du projet, «l’eau, l’air et le soleil sont les grands bienfaiteurs qui font baisser la moyenne de la mortalité des villes» (AEG, P.P. 295).
Ces informations, ainsi que celles des vitrines suivantes, proviennent de l’ouvrage édité en 2003 par le DAEL: 1896-2001, projets d’urbanisme pour Genève.
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/19-voies-de-communication/
20. O ubi campi
Toujours dans le cadre du concours de 1896 pour le plan d’extension des voies de communication, voici le projet nommé «O Ubi Campi» de l’architecte et maire de Plainpalais, Henri Hedmann, dessiné par-dessus un plan réel de Genève. Le tissu urbain est découpé en damier, système considéré à l’époque comme le plus représentatif de la modernité. Chaque quartier – la Praille, les Acacias, les Vernets et la Jonction – est ordonné autour d’un rond-point distribuant les voies principales en étoile. Contrairement au projet «Après les ténèbres la lumières», l’architecte ne propose ni gare, ni tracé ferroviaire. On notera encore la rectification du cours de l’Arve, ainsi que la canalisation de l’Aire (Archives du DCTI).
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/20-o-ubi-campi/
21. Plan directeur de Genève de Maurice Braillard, 1935
Maurice Braillard, militant socialiste, sera le chef du Département des travaux publics de 1933 à 1936, sous le gouvernement «rouge» de Léon Nicole. Une de ses aspirations est d’offrir une même qualité de vie à tous, notamment par un dispositif urbain équivalent. Le plan directeur de Maurice Braillard, premier plan régulateur de Suisse, doit être, selon les propres termes de son auteur «un canevas indiquant théoriquement les organes vitaux de la cité, voies de communications terrestres, fluviales et aériennes, emplacements de ports, des gares, répartition suivant la densité de la population des réserves de verdure, édifices publics, classification des quartiers suivant leur destination etc.».
Celui-ci s’organise de manière concentrique: un noyau historique réduit (en noir) entouré d’un centre administratif et commercial (en brun foncé) puis de deux couronnes résidentielles (en vert clair) et de zones industrielles accouplées aux gares de la Praille et de Cornavin (brun clair). Les traits noirs parallèles figurant sur la partie résidentielle représentent chacun une barre d’immeubles de six étages, ce qui implique la substitution totale du tissu bâti ancien. Les espaces laissés vides dans la partie résidentielle sont des espaces de délassement prévus pour accueillir des équipements collectifs culturels, sportifs et ludiques. Tous ces éléments reflètent bien la vision égalitaire de la société du gouvernement socialiste de l’époque (Archives du DCTI).
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/21-plan-directeur-de-geneve-de-maurice-braillard-1935/
22. Projet pour le quartier des Eaux-Vives, 1948
Considérant que le patrimoine à préserver est composé par la Haute-Ville, les abords de la rade et les parcs, ce plan d’ensemble propose la reconstruction et l’assainissement de tout le quartier des Eaux-Vives. La Maison royale, ainsi que le square de Montchoisy réalisé par Maurice Braillard en 1927, passent à la trappe. Ce projet, élaboré par la Commission d’étude pour le développement de Genève en 1948, est prévu en plusieurs phases, de 1950 à 2050.
Les barres d’immeubles, de la route de Frontenex jusqu’au quai Gustave-Ador, s’échelonnent suivant la pente avec des gabarits allant de huit à cinq niveaux, dégageant ainsi des vues sur le lac et le Jura. Le centre du quartier est occupé par les écoles, les salles de gymnastique et le centre civique, considérés comme les équipements fondateurs d’une vie de quartier. A partir de là, un large mail planté d’arbres descend jusqu’au bord du lac. Hormis quelques immeubles construits le long de la route de Frontenex, ce projet n’aura, par la suite, que peu d’incidence sur la reconstruction partielle du quartier des Eaux-Vives (Archives du DCTI).
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/22-projet-pour-le-quartier-des-eaux-vives-1948/
23. Zones et liaisons de verdure, 1948
Ce plan distingue trois zones de verdure: les zones de verdure publiques (parcs), les zones de verdure publiques construites (places de sport et de jeu) et les zones de verdure non publiques. Un système de liaison de verdure, constitué d’allées d’arbres et de promenades, permet de se rendre du centre-ville à la périphérie en passant d’un parc à l’autre.
Dans ces années d’après-guerre, le souci de la jeunesse constitue une priorité pour les auteurs de ce projet. Les places de sport et de jeu représentent une part importante des zones de verdure construites. La ville future compte 20 quartiers de 10’000 habitants; chacun dispose de deux à trois places de jeu pour les jeunes enfants, une place de sport avec salle de gymnastique, plus quelques places de sport pour les écoles secondaires. Quatre stades de compétitions sportives semblables à celui du Bout-du-Monde sont projetés, ainsi qu’un grand complexe sportif avec deux stades pour 30’000 à 50’000 spectateurs (Archives du DCTI).
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/23-zones-et-liaisons-de-verdure-1948/
24. Etude générale de la circulation à Genève, 1959
Face à l’accroissement considérable du trafic automobile, les autorités fédérales et cantonales prennent des mesures. En 1956, le Conseil d’Etat genevois mandate l’ingénieur Jean-Louis Biermann pour procéder à une étude de la circulation dont le rapport final est publié en 1959.
Jean-Louis Biermann articule son réseau routier sur deux pôles: les tangentes principales et les trois ceintures. Les tangentes principales forment un Y dont les branches se nouent au centre ville. La tangente nord-sud relie Lyon et le midi de la France à Paris et à la Suisse via Lausanne. L’autre tangente est située dans l’axe Paris-Genève-Mont-Blanc (le percement du tunnel est acquis depuis 1955).
Quant aux ceintures, Biermann fait une distinction entre ceintures externes, qui doivent relier les artères de grand transit aux villes, et les ceintures internes, qui facilitent le passage d’un quartier à l’autre de la ville. On notera qu’un pont sur la rade est prévu pour la ceinture intermédiaire (Archives du DCTI).
Ci-dessous, le détail de la jonction entre la tangente principale allant vers Chamonix et le futur tunnel du Mont-Blanc, et la ceinture intermédiaire. On notera au passage que la promenade Charles-Martin suit exactement l’axe de la ceinture intermédiaire (Archives du DCTI).
Dans son étude, J.-L. Biermann s’est inspiré du modèle américain de traffic engineering, sans tenir compte de son impact sur Genève. Ce projet sera d’ailleurs à l’époque très controversé, mais aucun de ses détracteurs ne se souciera jamais de la pollution et du bruit qu’il aurait occasionné au cœur même de la ville.
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/24-etude-generale-de-la-circulation-a-geneve-1959/
25. La liaison ferroviaire Cornavin – Eaux-Vives – Annemasse
La seconde moitié du 19e siècle voit la plupart des pays européens se doter de lignes de chemins de fer. Genève, située au cœur d’axes importants tels que Paris-Milan, se doit d’assumer son rôle de «plaque tournante». En 1858, lors de la construction de la ligne de chemin de fer Lyon-Genève et de son prolongement sur Lausanne, on parlait déjà d’une liaison ferroviaire avec la Savoie.
Mais ce n’est qu’avec la convention du 7 mai 1912 entre la Confédération suisse et le canton de Genève que le projet prend réellement corps. Les CFF s’engagent à prendre en charge la construction de la ligne de raccordement de la gare des Eaux-Vives à la gare Cornavin. Ils contribueront, avec la Confédération et le canton, chacun pour un tiers, aux dépenses occasionnées. La Première Guerre mondiale empêche la réalisation de la ligne. Il faudra attendre 1941 pour que commence la mise en chantier du tronçon Cornavin-La Praille.
En 2000, le Conseil d’Etat genevois demande formellement à la Confédération l’achèvement du raccordement de la gare des Eaux-Vives à la gare Cornavin. En août 2002, la signature d’un protocole d’accord entre la Confédération, le Canton de Genève et les CFF réactualise la convention de 1912. Aujourd’hui, outre le raccordement des réseaux ferroviaires internationaux, la liaison CEVA (Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse) a pour objectif d’assurer une meilleure attractivité au canton et à sa région et de résoudre une partie des problèmes de trafic en la connectant aux autres moyens de transports publics.
1. Plan de la compagnie genevoise des tramways électriques (lignes de banlieue) utilisé pour montrer les voies de chemins de fer déjà existantes et le projet de raccordement des gares de Cornavin et des Eaux-Vives. En rouge, les lignes françaises, et en bleu, les lignes suisses. A noter, à gauche (Echenevex), le projet de la ligne de la Faucille qui ne verra jamais le jour (AEG, Chemins de fer B 7). [Non reproduit]
2. Plan d’ensemble de l’avant-projet de raccordement des gares de Cornavin et des Eaux-Vives, annexé à la convention de 1912. Les pointillés indiquent que la ligne est souterraine (AEG, Chemins de fer B 6). [Non reproduit]
3. Plan de situation de l’avant-projet de raccordement des gares de Cornavin et des Eaux-Vives, annexé à la convention de 1912. Le plan déroulé mesurant environ dix mètres, nous ne vous en présentons que le tronçon allant du Bachet-de-Pesay à la gare des Eaux-Vives. Le trajet a été reproduit sur un plan actuel de Genève (AEG, Chemins de fer B 6)
4. Dépliant conçu et réalisé en 2003 par l’ancien Département de l’aménagement, de l’équipement et du logement, avec l’actuel tracé de liaison Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse (CEVA). [Non reproduit]
5. Détail du Grand plan de Genève et sa banlieue par Adrien Piccioni, datant de 1915 environ. Le géomètre transcrit sur son plan les projets de raccordement des gares des Eaux-Vives et de Cornavin, avec notamment celui de l’ingénieur Louis Favre, qui préconise la construction d’une nouvelle gare à rebroussement à Beaulieu. On remarquera également le raccordement avec un port de commerce au bord de l’Arve (BPU). [Non reproduit]
6. Convention du 7 mai 1912 entre la Confédération suisse et le Canton de Genève (AEG, Chemins de fer B 6)
7. Profil en long de l’avant-projet de raccordement des gares de Cornavin et des Eaux-Vives, annexé à la convention de 1912. Tronçon entre la gare de Carouge et la gare des Eaux-Vives. Les emplacements numérotés 1, 2, et 3, figurant sur le profil en long, sont reportés sur le plan de situation au-dessous (AEG, Chemins de fer B 6). [Non reproduit]
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/25-la-liaison-ferroviaire-cornavin-eaux-vives-annemasse/
26. Un musée d’art moderne au Parc La Grange
En juin 1983, le Conseil administratif de la Ville de Genève décide de la construction d’un musée d’art moderne. Le projet qui préconise de transformer un des bâtiments de l’ancienne Société d’instruments de physique à Plainpalais a les faveurs des autorités municipales. Cette volonté politique affichée n’empêche cependant pas d’autres projets de voir le jour. Celui d’utiliser le couloir ferroviaire désaffecté sous le pont Butin en est un exemple original.
L’architecte Jacques Vaucher, quant à lui, se propose de construire le musée dans le parc La Grange, à l’emplacement des serres du Service des parcs et promenades qui jouxtent l’actuel «Théâtre de l’Orangerie». Voici comment un journaliste du Courrier décrit le projet:
«Du fait d’une dénivellation de plus de 5 mètres entre le seuil du théâtre de l’Orangerie et le point le plus haut du terrain choisi, seules la façade nord, côté lac, et une partie de celle en ouest émergeraient. L’ensemble fournirait 7500 m2 de surface d’exposition, répartie sur deux niveaux. Les espaces intérieurs seront conçus pour être divisés ou localisés suivant l’ampleur et le nombre des œuvres exposées. Pour réaliser le gros œuvre, on utilisera essentiellement du marbre ou de la roche, couleur sable, du verre teinté vert clair et du cuivre. Quant à la toiture, elle sera recouverte de 1m80 de terre végétale et aménagée en jardin à la française, restituant ainsi une ancienne composition des lieux, datant de 1873. Cinq polygones octogonaux et deux petites pyramides à base rectangulaire assureront un très large éclairage zénithal […]. Une grande pièce d’eau reliera la façade de l’Orangerie à celle du musée, en les reflétant l’une dans l’autre.» (Le Courrier du 24 décembre 1983)
C’est finalement le projet utilisant les bâtiments de l’ancienne Société d’instruments de physique qui sera réalisé.
1. Plan du parc La Grange datant de 1872-73 où l’on voit bien, au centre, le jardin à la française dont s’inspire Jacques Vaucher pour imaginer le toit de son musée (BPU-CIG, carte murale 131, photographie). [Non reproduit]
2. Vue aérienne du parc La Grange avec, au centre, les serres où est prévue la construction du musée. [Non reproduit]
3. Dessins de Jacques Vaucher montrant l’entrée extérieure et intérieure du musée. On notera que la statue de Moore, placée devant l’entrée du musée, se trouve en fait devant le bien réel Musée d’art et d’histoire (Collection particulière)
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/26-un-musee-dart-moderne-au-parc-la-grange/
27. Bibliographie sommaire
- Appel en vue de la création d’un jardin zoologique dans les Bastions, Genève, avril 1870. AEG, Bibliothèque, Girod 168/84 et 85 ou 3328/29
- BAUDIN, Henry, «La terrasse de l’Evêché, à Genève», in: Heimatschutz, 11, nov. 1916, p. 161-172. AEG, Bibliothèque, R 3285/1916/11
- BORGEAUD, Charles, Histoire de l’Université de Genève. AEG, Bibliothèque, C 64
- BRULHART, Armand et DEUBER-PAULI, Erica, Arts et monuments. Ville et Canton de Genève, Genève, 1985. AEG, Bibliothèque, S 7025/1
- Collectif, La Genève sur l’eau, Bâle, 1997. AEG, Bibliothèque, S 7000/9/1
- Collectif, Inventaire suisse d’architecture 1850-1920 (INSA), Berne, 1984. AEG, Bibliothèque, S 7024/4
- Collectif, Le Monument Brunswick, Genève, 2002. AEG, Bibliothèque, F 45/19
- Collectif, 1896-2001. Projets d’urbanisme pour Genève, Genève, 2003, AEG, Bibliothèque, D 23
- Collectif, Une Réforme (1536), un Mur, des projets, expo Château de Penthes, Genève, 1986. AEG, Bibliothèque, C 9
- CORBOZ, André, «Les projets d’extensions de Genève sur Champel et sur le Rhône», in: Micheli du Crest 1690-1766, homme des Lumières, Maison Tavel, Genève, 1995. AEG, Bibliothèque, B 1581
- CORBOZ, André, «Micheli du Crest, Polybe et Salomon : examen du projet d’extension de Genève en 1730» (1re partie), in: Genava, N.S. 28, 1980, p. 155-182. AEG, Bibliothèque, F 22/14 ou R 1011/1980
- DOMINICÉ, Christian, «La critique des fortifications de Genève par Micheli du Crest», in: Micheli du Crest 1690-1766, homme des Lumières, Maison Tavel, Genève, 1995. AEG, Bibliothèque, B 1581
- DUBOSSON, Françoise, «L’aventure de Versoix-la-Ville: un idéal inachevé», in: A la recherche de la cité idéale, Arc et Senans, 2000, p. 70-79. AEG, Bibliothèque, C 507
- EL-WAKIL, Leïla, «Architecture et urbanisme à Genève sous la Restauration», in: Genava, N.S. 25, 1977, p. 153-198. AEG, Bibliothèque, R 1011/1977
- ETZEL, Charles, Mémoire de l’ingénieur Ch. Etzel sur le choix de l’emplacement de la gare centrale de la ville de Genève, Genève, 1854. AEG, Bibliothèque, Girod 97/21 ou G 63/7
- Exposé des motifs en faveur de l’établissement du débarcadère des chemins de fer dans les fossés de Rive, Genève, 15 fév. 1846. AEG, Bibliothèque, Girod 165/2
- FATIO, Antoine-Guillaume-Henri, Rapport sur l’établissement d’un hôtel pour les tribunaux et d’un bâtiment…, Genève, 1829. AEG, Bibliothèque, G 294/3 ou Girod 56/9 ou Rigaud 50/39
- FATIO, Guillaume, «Transformation des abords de la Cathédrale de Saint-Pierre à Genève», in: Heimatschutz, no 3, déc. 1940, p. 129-136. AEG, Bibliothèque, R 3285/1940/3
- FAUCHERRE, Nicolas, «Micheli du Crest et la fortification: le triomphe de l’Ecole française», in: Micheli du Crest 1690-1766, homme des Lumières, Maison Tavel, Genève, 1995. AEG, Bibliothèque, B 1581
- FAUCHERRE, Nicolas, Places fortes: bastions du pouvoir, 3e éd., Paris, 1990. AEG, Bibliothèque, B 1422
- FREY, Pierre A., «Le monument international de la Réformation, les conditions de la commande d’une sculpture monumentale, Genève 1902-1917», in: Genava, N.S. 34, 1986, p. 171-184. AEG, Bibliothèque, R 1011/1986
- FROMMEL, Bénédict, L’industrie à Genève, une histoire électrique, Genève, 1998. AEG, Bibliothèque, K 13
- FROMMEL, Bénédict, Les chemins de fer du canton de Genève, étude historique 1840-1960, Genève, 2004. AEG, Ms hist. 730
- GIRARD, Ariane, Architecture du paradoxe. Théâtre des Bastions (1782-1880). Regard sur l’architectonique théâtrale des XVIIIe et XIXe siècles à Genève, Genève, 1992. AEG, Ms hist. 638
- JUNOD, Jean-Marc-Louis, Débarcadère du chemin de fer pour Genève projeté à Rive, Genève, 1846. AEG, Bibliothèque, Girod 86/7 et Rigaud 124/21
- KOELLIKER, Martine, «Précisions historiques relatives au monument Brunswick: une “pièce montée” de toutes pièces?», in: Des pierres et des hommes, hommage à Marcel Grandjean, Lausanne, 1995, p. 629-642. AEG, Bibliothèque, S 1902/109
- LESCAZE, Bernard, HILER, David et FREI, Anita, La Société coopérative d’habitation Genève et l’histoire du logement social à Genève, Genève, 1994. AEG, Bibliothèque, C 309
- Que deviendra l’ancienne prison de l’Evêché?, Genève, 1916. AEG, Bibliothèque, 86/N/30
- La Question de l’Evêché, Genève, 1917. AEG, Bibliothèque, 3360/8
- Rapport de la commission d’enquête sur la question du meilleur emplacement à adopter pour le débarcadère d’un chemin de fer venant de France, Genève, déc. 1845. AEG, Bibliothèque, Girod 167/1 ou Girod 164/45 ou G 161/18
- ROTH, Barbara, Le bestiaire du bout du lac, Genève, 1994. AEG, Bibliothèque, S 7039/12
- ROUILLER, Jean-Frédéric, Un problème centenaire. La construction des chemins de fer de la région genevoise et leur raccordement, Genève, 1947. AEG, Bibliothèque, B 1716
- ROUILLER, Jean-Frédéric, Origine et développement des voies de communications genevoises, Genève, 1958. AEG, Bibliothèque, 86/Fc/4
- Société coopérative d’habitation Genève, Cité jardin de l’avenue d’Aïre, Genève, 1924. AEG, Bibliothèque, 86/Bd/29
- WINIGER-LABUDA, Anastazja, «La survie clandestine des idées urbanistiques de Micheli du Crest», in: Micheli du Crest 1690-1766, homme des Lumières, Maison Tavel, Genève, 1995. AEG, Bibliothèque, B 1581
- Zoo. Mémoires d’éléphant. Le zoo de Genève à Saint-Jean entre 1935 et 1940, Genève, [1993]. AEG, Bibliothèque, B 1340
- ZURBUCHEN, Walter, Prisons de Genève, Genève, 1977. AEG, Bibliothèque, 5484
https://archives-etat-ge.ch/page_de_base/27-bibliographie-sommaire/